18 mai 2011

Second degree on TV

Entendu en début d'année une annonce radio pour le programme télé du soir, qui invitait avec grand enthousiasme le téléspectateur à regarder l'Eurovision pour « retrouver les commentaires acerbes et drôles » de tel animateur...


On comprend définitivement qu’il n’y a rien à attendre de la télévision le jour où l’on constate qu’elle préfèrera toujours nous montrer un spectacle minable comme l’Eurovision, quitte à lui superposer le commentaire d’un animateur ironique qui le dénigre pour rendre le tout « intéressant », plutôt que de nous proposer une véritable soirée musicale de qualité à la place. Second degré ! Nous mangerons la merde jusqu’au bout, dût-on pour cela nous la faire réchauffer ou l’agrémenter d’un peu de poivre. Cela vaut mieux que de cuisiner autre chose.




Le second degré, c’est drôle évidemment. La majeure partie de notre humour et de notre esprit est basée dessus. Le second degré, c’est drôle jusqu’à ce qu’on réalise que ça empêche quelque chose d’autre de se jouer. Le second degré, en emballant le moche pour le rendre intéressant, occupe la place du beau. Le second degré, c’est ce qui permet d’être aussi con et laid que le reste, mais sans renoncer à la distinction : on vit comme un con, on fait les choses que fait un con, on baigne dans la même connerie, mais on le fait exprès, on n’est pas con ! L’Eurovision c’est nul, mais on le sait, c’est ça qui est drôle ! lol !


Le second degré, c’est drôle jusqu’à ce qu’on réalise que cela permet de refourguer des choses que personne ne voudrait autrement. En ricanant au second degré, vous faites perdurer le moche. Il y a des émissions « débiles » qui ne vivent que de l’audience de ceux qui les regardent « pour rire », au second degré. Et des professionnels qui n’auraient plus de raison d’être si la merde télévisuelle et médiatique dont ils ricanent avec vous cessait d’exister. Ce dont ils prétendent se démarquer est en réalité leur nourriture la plus nécessaire.


1er degré / 2nd degré



En ricanant au second degré, non seulement vous ne faites pas changer les choses, mais vous y participez. Au-delà d’un certain stade, le second degré rejoint le premier : produire un jeu volontairement idiot avec un animateur « décalé » n’est pas moins produire de la débilité, se délecter d’un film « trop débile ! » ajoute à la débilité, et celui qui rit à cet humour « trop lourd ! » est un lourd, celui qui jubile de cette veste « trop kitsch ! » est un kitsch, et celui qui met 1 centime de sa poche pour acquérir cet truc « trop ringard » qui le fait kiffer, augmente de fait la quantité de ringardise dans le monde.



Ces choses que vous trouvez moches, laissez-les donc mourir !

9 commentaires:

  1. Une bonne synthèse:

    http://www.youtube.com/watch?v=fZaw31aIApM

    ClockworkBlack

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  2. Pardon pour ce message si peu constructif, mais vraiment, j'adore cet article !

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  3. c'est bien dit, et c'est une question de fond, qui concerne la totalité de notre culture de merde et son état actuel.

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  4. Le divertissement audiovisuel à heure de grande écoute, c'est " Les zinzins de l'espace " version adulescent.

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  5. Bonjour, votre article est intéressant, cependant, ne peut-on pas dire que votre site tout entier se base sur le second degré ?

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  6. Sujet à la con d'oisifs chômeurs/étudiants/rentiers qui à force de s'emmerder pensent que leurs jugements esthétiques ont une quelconque importance dans la bonne marche de la société (et de l'univers).

    Bon, moi aussi je suis un étudiant au chômage (ou un chômeur qui fait des études, je sais plus) et ayant moi aussi du temps à perdre à penser à la place du second degré dans notre société voilà mon avis élaboré à partir d'un raisonnement empirique à partir d'une longue observation du monde contemporain et mûri par une lente et profonde réflexion offerte par la lecture des philosophes nihilistes-post-positivistes-pessimistes-progressistes qui sont assurément les gens les plus sages :

    Comme disait ma mère en rigolant grassement devant Arthur télécommande à la main devant mon regard atterré d'adolescent boutonneux, maigre et puceau (donc intello prétentieux écoutant du rock progressif et lisant des choses aussi chiantes que les histoires mythomanes de Malraux) "j'ai pas envie de réfléchir, j'ai envie de regarder de la merde ce soir , je t'emmerde! Ah! Ah! Ah!".
    Étant donné que l'avis des mères est toujours celui qui finit par l'emporter avec le temps, nous pouvons déjà conclure qu'il n'y rien de plus agréable que de temps en temps regarder la pire merde télévisuelle en rigolant de manière très vulgaire : ça détend les muscles du visage et du trou de balle après une dure journée en plus d'affiner le goût de l'homme raffiné en le laissant un peu se reposer.

    S'il est maintenant établi que tout un chacun doit cultiver ses goûts de merde, on ne sait toujours pas s'il est acceptable de regarder de la merde "paske c tro lol décalé mdr tro coul jé regardé ca hier avec dé potes bouré tro méga mdr".
    Ma conclusion est que le second degré devrait être réservé au gens intelligents, cultivés et raffinés (nous les chômeurs qui lisons des intellectuels suicidés et inconnus des années 60 en pdf sur l'ordinateur) et que les autres de toute façon devraient juste fermer leurs gueules, être interdits de discuter, d'émettre des sons avec la bouche plus de cinq secondes d'affilée partout (sur internet, dans les cyber-cafés, dans le métro, dans la rue) pour cause d'incapacité à raconter autre chose que de la merde en raison d'un q.i trop faible et que nous devrions juste trouver un moyen de faire travailler ces gens-là (travaux d'intérêt général, esclavage,...) afin de leur épargner les efforts de la réflexion et le besoin de discussion, et ainsi supprimer le bruit de fond qui dérange partout l'homme de bon goût. Les politiques cesseront aussi de tout le temps demander l'avis de ces gens-là ou de s'adresser à eux dans les émissions politiques (le droit de vote sera aussi enlevé aux trois quart de la population possédant un q.i trop faible) et pourront enfin parler de politique.

    Voilà, de rien.

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  7. Et puis ça drague mieux le téléspectateur, ça joue sur la connivence, ca créé un lien superficiel : "Vous voyez ce que je veux dire ?"

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  8. Et si on trouve que l'Eurovision c'est sympa et qu'on en profite au premier degré, qu'est-ce qu'il se passe ? (C'est mon cas). Quand j'étais petit Lagaff me distrayait bien honnêtement.
    Pour faire court, aller dans ton sens, mais en détournant ton propos : c'est l'invocation (sans cesse rebattue) du second degré qui transformerait tout aliment en merde, et non le second degré qui servirait à poivrer.

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  9. En effet : le parti pris de programmer malgré tout ce spectacle dans le but avoué de le tourner en dérision fait que du coup, personne n'a son compte. Ceux qui trouvent que c'est de la merde ne passent pas un bon moment pour autant, et ceux qui voulaient tranquillement mater l'Eurovision se le gâchent en se fadant le commentaire ironique...

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