19 avril 2007

Journalisme et déontologie

Plus que trois jours. Et enfin nous connaitrons les finalistes de la Star Academy républicaine. Quels candidats parmi Jean-Marie, Nicolas, François et Marie-Ségolène, les Français renverront-ils à l'anonymat ? Pour l'occasion, des petits malins comptent faire leur pub en annonçant à l'avance la tendance des résultats, Guy Birenbaum, l'Organe ou le faux journaliste Morandini comptent ainsi sur leurs blogs/sites respectifs informer leurs lecteurs en avant-première. Ce qui ne manque pas de faire scandale.
On en appelle ici aux valeurs républicaines, là à la déontologie journalistique, aux règles bafouées. Pourtant il y a plus grave dans une élection présidentielle, en matière de déontologie, que l'annonce prématurée des résultats. Il y a ceux qui n'hésitent pas à écrire leurs articles avant d'en avoir pris connaissance.


21 avril 2002, la gueule de Le Pen apparait sur les écrans. C'est lui qui affrontera Chirac au second tour. Le candidat socialiste en profite pour se retirer définitivement de la politique. Énorme onde de choc. On en appelle au sursaut citoyen blabla, front républicain blabla. On va bouffer de l'anti-fascisme pour quinze jours.

22 avril 2002, 7 heures du mat, je suis chez mon vendeur de cancer en paquets de 20 préféré et en profite pour jeter un oeil sur les différentes "une" des journaux et hebdomadaires. Alors que tous poussent des cris de vierge, appelant à faire barrage à la bête immonde, Marianne le journal de Jean-François Kahn, affiche en une un couillu : Peut-on réélire Supermenteur ?.

Bonne question


Et c'est vrai que la question mérite d'être posée. Et ce malgré la présence de l'extrême-droite au second tour. Après tout Chirac n'est-il pas le symbole même de la dégénérescence de la classe politique française ? Corruption, affairisme, faux électeurs, justice douteuse, affaire Mery, mensonges, promesses électorales jamais tenues. Si un homme, à égalité avec Mitterrand certes, est responsable du désamour de la population française pour sa classe dirigeante au point d'offrir en plus d'une abstention record quasiment 20% à un aventurier populiste, c'est bien Chirac. Alors lui principal responsable de la situation devrait se voir accordé un vote massif et sans question du simple fait que son adversaire représente un épouvantail à belles âmes ? Non. Seul Marianne, au lendemain de cette énorme surprise qu'est l'élimination de Lionel Jospin, ose mettre les pieds dans le plat.

Bien une fois cela posé voyons ce que propose l'hebdo de JFK sous la plume de son directeur. C'est en fin de son édito (que vous retrouverez en intégralité en fin de post) : Donc, bien que certains d'entre nous préférerons voter blanc, il nous apparaît que, faute de mieux, et sans aucune illusion, il nous faut donner cette fois, sa chance à Lionel Jospin ! .

Lionel Jospin ? Coquille ? Non pas du tout. Jean-François Kahn, qui aime tant donner des leçons de déontologie à ses petits camarades journalistes, a en fait écrit son édito avant les élections. Les 3 articles traitant du premier tour (édito JFK, l'article de François Darras "les vrais leçons du premier tour" et le prophétique "Maintenant, les socialistes vont utiliser les affaires" de Daniel Bernard) ont tous été écrits avant de connaitre les résultats du vote. Pourtant tout y est, l'analyse de l'abstention massive, les scores bas des deux partis poids-lourds, la montée des extrêmes (mais ils n'avaient pas imaginé à quel point) et les futures stratégies d'entre deux tours avec notamment un pronostic de ticket Jospin/Fabius pour la gauche. Une analyse en profondeur d'un évènement qui ne s'est pas encore déroulé. Il fallait oser.

Je crois que n'importe où ailleurs que dans notre pays cela aurait fait un énorme scandale et les auteurs des articles incriminés auraient démissionné. Mais pas en France. J'ai toujours été étonné que cela n'ait pas fait plus de bruit, serait-ce une pratique courante dans les rédactions ?. L'affaire se règle avec l'envoi à tous les distributeurs de l'ordre de retirer de la vente le numéro, mise au pilon et réimpression avec léger battage de coulpe à l'appui d'un nouveau numéro. Et c'est tout. Seule vraie conséquence, Marianne parait maintenant le samedi.

Il ne doit pas rester beaucoup d'exemplaires de celui-ci que je garde religieusement et auquel je pense chaque fois que JFK vient grenouiller sur les ondes ou dans la boîte à cons.

Pour le plaisir voici les articles de Jean-François Kahn et de François Darras. A faire circuler dans les écoles de journalisme.Collector.
(cliquez pour agrandir)










8 commentaires:

  1. Schivardi Président !

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  2. Je vois pas pourquoi on chipote là, peuvent commencer à les donner dès dimanche matin les résultats. Zont déjà commencé à les donner depuis 4 mois. Et puis s'enfoncer un peu plus ou un peu moins dans la fosse septique qui nous a tenu lieu de campagne et qui aussi nous tient lieu de démocratie, ça change pas grand chose, c'est même plus logique, ça fait moins pinailleurs de la 25ème heure. Si on était plus franc du collier, on annulerait tout et on mettrait Morandini dans le siège du plus haut magistrat de la République. Suis-je bête, en quelque sorte, c'est précisément ce qui est en train d'arriver.

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  3. Hum, d'un point de vue déontologie, c'est bien de donner des leçons (puisque c'est de cela qu'il s'agit).

    D'un point de vue pratique, comment fait un journaliste dont l'article paraît à 7h un lendemain de scrutin sachant que les résultats ne seront pas connus avant de mettre sous presse ?

    A part en écrivant son article à l'avance, je ne vois pas.

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  4. mais TOUT est déjà écrit à l'avance, pas la peine de se fatiguer avec tout ça.

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  5. Vos gueules là dedans ! J'arrive pas à dormir !

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  6. Cette année, JFK a retenu la leçon. Marianne paraîtra le mardi, après le premier tour. JFK a appris d'une bourde. C'est une grande qualité.
    La faute déontologique, s'il y a faute, est légère. S'il y a faute, il en a tiré une leçon. Cela n'est pas léger. Admettre l'erreur, ne plus en faire un crime passible de lynchage, pourrait aider beaucoup de monde.

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  7. pour t'aider à t'endormir Atlantis, je te recommande la méthode Le Pen, dite la "manu militari".

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  8. @Anonyme :

    Si le point de vue pratique doit justifier une pratique ridicule en argumentant -en gros- que le journaliste "n'a pas le choix", alors ça n'a aucun intérêt pratique.

    Le journaliste peut choisir de parler d'un autre sujet plutôt qu'analyser un fait qui ne s'est pas encore produit.

    Ou un choix peut être fait pour retarder l'édition, le temps d'écrire quelque chose qui corresponde à la situation.

    bon, ceci dit, tout ça n'est pas très grave, JFK a pris un risque et s'est raté... tant pis pour sa crédibilité.

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