10 août 2006

Les experts.


« Tu gagneras ta vie honnêtement. Tu seras expert mon fils. »


Quelle société curieuse que la nôtre... On nous formate pour ne surtout pas regarder le paysage tandis qu’on avance péniblement sur le droit chemin et on s’aperçoit qu’à nos côtés prospèrent bon nombre de parasites des forces du mal, tolérés, non : institués… Disons que certaines professions mériteraient largement des comparutions en correctionnelle voire carrément, au plus haut niveau de l’Etat peut-être, en cour d’assises… Assoce de malfaiteurs… Ce qui met en rogne l’honnête homme c’est que le petit professionnel du racket légal s’acquitte toujours de son taf avec une parfaite bonne conscience… A société schizo, Deleuze dirait que c’est l’économie qui veut ça, société de schizo machines et demi, car c’est leurs économies qui veulent ça…

« On paye trop d’impôts ! ». Ouais ! Alors le système a créé les associations caritatives (« Faites un don, vous serez d’autant moins imposés "), et les conseillers financiers, ces petites chauve-souris commissionnées ersatz des banquiers non moins vampirisant... Tout le monde trouve ça normal de faire appel à un fiscaliste pour payer moins d’impôts quand tout ce beau petit monde jette la pierre aux expatriés en terre helvétique ou autre, alors que là est l’ultime preuve de rigueur du professionnel qu'ils ont consulté, le conseil optimal avec le sans appel « Bah suicidez-vous. »… Charité bien ordurière commence toujours… Oui elle commence toujours…

Passons. Tout cela n’est que menu fretin pour le quidam (si si !) rapport aux pickpockets de son quotidien que sont les assureurs... Les assureurs, nos nounous aux petites cuillères pleines de Jozacine…

Vous voulez vivre sous un toit ? Il vous faut une assurance habitation. Vous voulez vous déplacer en véhicules motorisés, il vous faut une assurance véhicules. Vous voulez respirer ? Nan, sans déconner, vous voulez vraiment respirer ?... Etonnant ! Soit : il vous faut une assurance. Vous voulez tomber malade ? Pareil : faut être assuré socialement et même souscrire à une mutuelle. La mutuelle ce nouvel assureur, et on nous parle encore de la Sécurité Sociale et de son gros trou gangbangué… Et nous, on n’est pas gangbangué peut-être ? Non mais des fois ! Vous voulez crever ? Il vous faut une assurance-vie ! Naturellement, il vous faut cotiser pour tout ça, çà et là, corollaire de tous ces passe-temps pas tous toujours divertissants… Vivre se paye, et en menstrues, euh pardon, en mensualités souvent… C’est marqué dans la loi ! C’est la vérité ! Et elle est impérative et onéreuse même lucrative, tout dépend de quel côté du manche. Epi(coup-de)thète et collé gramme. Saignement à blanc et vache à lait...

Nous sommes assurés de partout donc. Blindés. De vrais coffres forts sur pied. Enfin on le pense. Et cette pensée nous fait du bien : nos assurances nous rendent tellement heureux… Tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes. Et puis un triste jour, le sinistre. Vous vous dites « pas de panique, je suis assuré. Oui, je suis assuré, je suis rassuré… ». Et là, c’est le drame ! Et on entend tout à coup les mots « plafond », « police », « expert »…

Cette belle machine bien huilée dont vous deviniez bien tous les menaçants rouages mais pas plus… Tous ces abominables petits mots, véritables incantations mécaniques, dans toutes ces petites lignes sur toutes ces grandes pages que vous n’aviez pas même lues car votre assurance est obligatoire et que les contrats d’assurance sont des contrats dits d’adhésion (c’est-à-dire que vous ne pouvez rien en discuter, rien négocier, votre adhésion est inconditionnelle alors à quoi bon le lire ?!) et dont le moindre commencement de lecture se termine immanquablement par des vomissements et des tapages de tête contre les murs, le vocabulaire administratif s’y épanouissant dans toute sa splendeur…

Pourtant, lire vos contrats d’assurance vous ferait inévitablement comprendre que toutes les clauses sont contre vous.... Allez, là n'est pas un scoop ! Personne n'est dupe. Mais, par un optimisme digne d'une autosuggestion-égocentrique-masturbatoire-allumettique-vaudou, vous vous dites : « Against the clauses. » Et il débarque, avec son petit cahier, son petit stylo, et son œil torve qui dit : « J’en sais long moi pauvre nain. C’est pas parce que j’ai pas l’air d’être concerné par la matière. J’ai appris des trucs ». Appris des trucs, en théorie quoi… Mais il est expert ! Vous n’avez pas accès à son CV mais il est expert ! On nous l’a dit et il est là ! C’est l’expert ! L’expert c’est lui ! Ah non c’est elle là, avec sa tronche de mal baisée ! Ah bon ? Sans dec’ ? C’est ça l’expert ? Quel est le putain de rapport ? What’s the fucking point ? Loi générale de l’emmerdement maximal de Murphy ou mieux, loi particulière de l’embuscade : « When your attack is going too well : it’s an embush ! ». Et l’expert ne mettra pas dix minutes à vous sortir tout à fait de votre quouéisme somnambulique au moment de son chiffrage, vous le témoin d’une humanité qui trime et qui morfle, vous l’innocente victime du Sort… Oui tout est relatif et l'argent ne fait pas le bonheur... Cela dit quand il sort sans permission, ça participe au moins de votre malheur, qui plus est en territoire Société de Consommation...

En effet, l’expert est surtout expert pour chiffrer vos dommages selon les barèmes en vigueur dans les pays sous développés… L’expert vit apparemment sur un autre continent si ce n’est tout bonnement pas sur une autre planète… L’expert, la personne qu’il faudrait appeler en vrai pour carrément faire vos réparations : ça vous coûterait tellement moins cher !… Mais là n’est pas son travail… Son travail c’est d’avoir du travail avec les assurances et l’assureur tient par-dessus tout à ne pas faire son travail... L’expert est son hitman… Le bras armé qui vous met au pas. L’expert le mec qui vous ruine mais dont la parole est d’or… Juge et partie et bourreau… « Mais puisque je vous dis que j’ai quinze devis de valeurs égales à faire valoir ! ».

Comment faire pour vous en sortir ? Bande de nigauds ! Appeler un autre expert pour une contre expertise. Bien évidemment vous lirez dans votre contrat que la contre expertise est à votre charge. Logique : vous voulez vous battre pour plus d’oseille, alors autant étouffer la révolte dans l’œuf… A double tranchant, sens unique d’un côté, interdit de l’autre. Tout se réduit toujours à la question du côté du manche...

Bref, pour résumer, gardez-vous bien d’avoir un accident ! « Comment ? Il est impossible de prévoir un accident ! C’est l’essence même de l’accident ! » Mais allons, faites un peu preuve de bonne volonté et d’imagination ou il vous en coûtera royal dans l’cul !

Au final, en comptant vos cotises, la franchise, on peut conclure que quand vous subissez un dommage, vous avez de grandes chances de faire gagner encore plus d’argent à votre assureur qu’en temps normal. Bingo et Jackpot-road !

« Assurez-vous, assurez-vous qu’i disait. »
Ex-perd et passe… Parole d’évangile…

PS : on exagère hein ? Pourtant certaines expériences parlent pour nous. On pense à tous les pauvres blaireaux dont les assureurs refusent désormais de les assurer pour des causes sur lesquelles ils n’ont aucune maîtrise. La malchance n’est pas assurable. On pense à l’arnaque du bonus malus, quand on sait désormais que les cotisations sont augmentées en loozedé quand vous êtes impliqués dans un accident avec zéro tort pour vous. On pense aux indemnisations ridicules post cambriolages, avec réduction artificielle de la valeur des biens. Assureurs, on pense fort à vous. Gros bisous.



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